Lorsque quatre jeunes musiciens se réunissent pour enregistrer trois quatuors à cordes de Joseph Haydn, de surcroît pour un premier disque, c’est qu’ils se proposent de rendre hommage à un compositeur souvent négligé, classé hâtivement au rang des compositeurs classiques. Et pourtant, Haydn est bien un «découvreur», et même le fondateur du genre du quatuor, conduit par la suite à sa perfection par W. A. Mozart, Franz Schubert et Ludwig van Beethoven. Par son jeu, le Quatuor Ébène nous révèle à quel point le propos de Haydn est novateur et ambitieux, impliquant l’auditeur dans une véritable expérience, où se jouent l’ordre et l’équilibre tout autant que l’invention, le caprice, la méditation et l’introspection.
Cette passion du jeu imprime aussi sa marque au Quatuor Ébène, depuis les premiers temps de sa formation en 1999. Cette année-là, Pierre Colombet, Gabriel Le Magadure, Mathieu Herzog et Raphaël Merlin sont élèves du conservatoire national de région de Boulogne-Billancourt ; tous les quatre sont également passionnés de jazz et d’improvisation. Soudés par ces affinités, ils se partagent bientôt le deuxième prix au Concours International de Bordeaux (le premier prix n’ayant pas été décerné) et remportent également le Prix de la meilleure interprétation d’une œuvre contemporaine. En 2003, la Fondation Groupe Banques Populaires (autrefois Natexis) les accueille. Ces brillants débuts sont confirmés en 2004, tout juste cinq ans après sa constitution, lorsque le Quatuor Ébène remporte, à Munich, le Premier Prix du Concours International de l’ARD, ainsi que le Prix du Public, trois autres prix spéciaux et le prix Belmont (il est alors le premier quatuor à cordes français à remporter ce prestigieux concours).
Les quatre musiciens bénéficient du soutien et des conseils de professeurs renommés : après deux cursus au Conservatoire de Paris avec le Quatuor Ysaÿe et avec Gabor Takacs au conservatoire de Genève, le Quatuor Ébène travaille régulièrement avec Eberhardt Feltz (Berlin), et plus ponctuellement avec le pianiste Pierre-Laurent Aimard, et le compositeur Gyorgy Kurtag.
Invité à se produire dans de prestigieux festivals et salles de concerts (Philharmonie de Berlin, Herkulesaal de Munich, Théâtre du Châtelet, Wigmore Hall de Londres, Auditorium du Louvre, La Folle Journée de Nantes, Festival de la Roque d’Anthéron…), le Quatuor Ébène compte comme partenaire de musique de chambre des interprètes de renom, comme Gary Hoffman, Franck Braley, Brigitte Engerer, Antoine Tamestit, Bertrand Chamayou, Alexandre Tharaud, Paul Meyer, Patricia Petitbon…
Reflet de leur curiosité musicale, le répertoire constitué progressivement par le Quatuor Ébène se démarque par son originalité et son ouverture. L’un des points forts est représenté par les arrangements, et improvisations (Miles Davis, Astor Piazzola…). En 2002, il enregistre l’album jazz Eros et Thanatos avec le compositeur tromboniste allemand Daniel Casimir. Partant de là, les œuvres des époques anciennes revêtent une étonnante actualité. Sous l’archet de ces musiciens, les notions telles que « ancien » et « nouveau » sont ainsi dépassées. Aucune oeuvre n’est reléguée dans le tiroir du répertoire « déjà appris » : l’œuvre est recréée à chaque répétition, à chaque représentation.